Guide du patient

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Ce guide détaille la prise en charge des anévrismes de l’aorte abdominale (dilatations de l’artère principale du corps). Selon les études, une intervention est recommandée lorsque l’anévrisme atteint 5,5 cm chez l’homme ou 5,0 cm chez la femme. La réparation endovasculaire (REVA) offre des risques à court terme plus faibles et une récupération plus rapide que la chirurgie ouverte, mais elle nécessite une surveillance à vie. Le choix entre les techniques dépend de l’anatomie, de l’état de santé du patient et de son engagement à respecter un suivi médical régulier.

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Guide du patient pour comprendre et traiter les anévrismes de l’aorte abdominale

Table des matières

Introduction : Le problème clinique

Un anévrisme de l’aorte abdominale (AAA) correspond à une dilatation dangereuse de l’aorte, le principal vaisseau sanguin irriguant le corps. On parle d’AAA lorsque le diamètre dépasse 3 cm (environ 1,2 pouce). Le principal risque est la rupture de la paroi artérielle fragilisée, provoquant une hémorragie interne souvent mortelle.

L’objectif du traitement est de réparer l’anévrisme de façon programmée, avant qu’il ne se rompe. Cet article présente les critères décisionnels et les options thérapeutiques, fondés sur les données médicales actuelles.

Facteurs de risque et prévalence

Aux États-Unis, les AAA concernent environ 1,4 % des personnes âgées de 50 à 84 ans, soit 1,1 million d’adultes. Ils sont plus fréquents chez les hommes que chez les femmes, et moins répandus parmi les populations noires et asiatiques que chez les personnes blanches.

Parmi les facteurs de risque :

  • Âge avancé
  • Antécédents familiaux
  • Tabagisme (actuel ou passé)
  • Hypercholestérolémie
  • Hypertension artérielle

Le diabète sucré est, quant à lui, associé à un risque réduit. Le diamètre de l’anévrisme reste le principal indicateur du risque de rupture.

Quand opérer ? Seuils et délais

Des essais cliniques ont établi des seuils de taille précis. Pour la plupart des hommes, l’intervention est recommandée à partir de 5,5 cm de diamètre. En deçà, la surveillance rapprochée est privilégiée, la chirurgie n’apportant pas de bénéfice en termes de survie.

Chez les femmes, dont l’aorte est naturellement plus petite et le risque de rupture plus élevé à diamètre égal, le seuil est abaissé à 5,0 cm.

Pour les patients non opérables, le risque annuel de rupture s’établit comme suit :

  • Hommes : 1 %/an pour 5,0–5,9 cm ; 14,1 %/an au-delà de 6 cm
  • Femmes : 3,9 %/an pour 5,0–5,9 cm ; 22,3 %/an au-delà de 6 cm

Cette augmentation exponentielle du risque justifie une intervention au bon moment.

Surveillance et traitement médical

Pour les petits anévrismes, une surveillance régulière est préconisée :

  • 3,0–3,9 cm : échographie Doppler tous les 3 ans
  • 4,0–4,9 cm : échographie annuelle
  • ≥ 5,0 cm : échographie tous les 6 mois

L’arrêt du tabac est essentiel, car il réduit les risques de croissance et de rupture. Les statines, bêta-bloquants et antihypertenseurs peuvent être prescrits pour le risque cardiovasculaire, mais sans effet démontré sur l’évolution de l’anévrisme.

Options chirurgicales : EVAR vs chirurgie ouverte

Deux techniques principales sont disponibles :

Chirurgie ouverte : incision abdominale permettant de clampeler l’aorte et de poser une prothèse. Méthode éprouvée et durable.

Réparation endovasculaire (EVAR) : technique mini-invasive par cathétérisme, avec pose d’une endoprothèse pour exclure l’anévrisme. Moins invasive, elle évite le clampage aortique.

L’EVAR n’est pas adaptée à tous : une anatomie favorable (zones d’ancrage saines, artères iliaques et fémorales suffisamment larges) est nécessaire.

Données de la recherche : Comparaison des résultats

Plusieurs études montrent que l’EVAR présente une mortalité à 30 jours inférieure à celle de la chirurgie ouverte :

  • EVAR : 0,5–1,7 %
  • Chirurgie ouverte : 3,0–4,7 %

La récupération est aussi plus rapide (2 jours d’hospitalisation médiane contre 7). Cependant, l’avantage survie s’estompe après 2–3 ans.

Les taux de réintervention diffèrent :

  • EVAR : 9,0 % (souvent mineures)
  • Chirurgie ouverte : 1,7 % (liées à la réparation), mais 9,7 % pour complications de l’incision (contre 4,1 % pour EVAR)

Prendre la décision : Points à considérer

Le choix se fait en concertation avec le médecin, en tenant compte de :

  1. L’anatomie (compatibilité avec l’EVAR)
  2. L’état de santé et le risque opératoire
  3. L’acceptation d’une surveillance à vie après EVAR
  4. Les préférences personnelles (récupération, risques)

L’EVAR est souvent privilégiée chez les patients à haut risque. Les autres peuvent discuter des deux options.

Suivi à long terme et surveillance

L’EVAR nécessite une surveillance par imagerie à vie, contrairement à la chirurgie ouverte.

Après EVAR, un suivi type comprend :

  • Angioscanner initial
  • Échographie Doppler annuelle
  • Autre imagerie si nécessaire (scanner, IRM)

Ce suivi permet de détecter d’éventuelles endofuites ou problèmes de dispositif. Le risque de rupture post-EVAR est de 5,4 %, d’où l’importance d’une surveillance continue.

Les risques liés aux radiations et produits de contraste, bien que faibles chez les personnes âgées, doivent être évoqués.

Incertitudes et recherches en cours

On ignore pourquoi l’avantage survie de l’EVAR disparaît après 2–3 ans. Les hypothèses incluent :

  • Facteurs cardiovasculaires sous-jacents
  • Mauvaise observance du suivi
  • Inflammation résiduelle
  • Problèmes de dispositif ou anatomie inadaptée

18 à 63 % des EVAR sont réalisés chez des patients à l’anatomie non idéale, d’où l’importance d’une sélection rigoureuse.

Techniques avancées pour cas complexes

Pour les anévrismes complexes (impliquant artères rénales ou digestives), des techniques endovasculaires spécialisées existent :

EVAR fenêtré : endoprothèse sur mesure préservant les artères branches (anévrismes abdominaux).

EVAR branché : endoprothèse à bras latéraux (anévrismes thoraco-abdominaux).

Ces techniques, encore en évaluation, nécessitent un suivi spécialisé (angioscanner) et ne sont disponibles que dans des centres experts.

Recommandations officielles et dépistage

Les sociétés savantes (SVS, ESVS) recommandent :

  • Intervention à 5,5 cm pour les hommes
  • Intervention à 5,0 cm pour les femmes
  • EVAR si anatomie adaptée
  • Aucun médicament ne ralentissant spécifiquement la croissance

Le dépistage échographique est suggéré pour les apparentés au premier degré. Medicare le prend en charge pour certains profils (antécédents familiaux, hommes fumeurs de 65–75 ans).

Conseils aux patients et conclusion

Pour un homme fumeur de 64 ans avec un AAA de 5,7 cm, la démarche recommandée est :

  1. Angioscanner pour évaluer l’anatomie
  2. Bilan préopératoire
  3. Décision partagée selon anatomie, risque et préférences

Si l’anatomie convient, l’EVAR est indiquée. Les patients à haut risque la privilégieront ; les autres choisiront en connaissance des contraintes de suivi.

Les apparentés au premier degré de plus de 65 ans devraient envisager un dépistage. L’arrêt du tabac reste primordial.

Source

Titre original : Prise en charge des anévrismes de l’aorte abdominale

Auteurs : Andres Schanzer, M.D., et Gustavo S. Oderich, M.D.

Publication : The New England Journal of Medicine, 28 octobre 2021, Volume 385, Numéro 18, Pages 1690–1698

DOI : 10.1056/NEJMcp2108504

Cet article s’appuie sur une publication du NEJM pour offrir une information complète et fidèle sur la prise en charge des AAA.